Perles sur la pénitence

 

Homélie du 28 avril 1968 – 2ème dimanche après Pâques, du Bon Pasteur
[…] Ici une pensée traverse ma tête et mon cœur, pourquoi Pierre est tellement honoré, pourquoi Pierre est mis au premier rang, pourquoi Pierre était dans la liste des apôtres Pierre, Jacques, Jean... parce que il est pasteur. En quoi il est l’image de tous les pasteurs ? Car il a fait la pénitence. Car il a abandonné le Christ, car il est tombé lui-même, mais il a su revenir vers le Christ en pleurant, en se jetant dans les eaux. […] Il a une chose admirable, il sait faire la pénitence, et la grandeur de Pierre, tiare de Pierre, c’est les larmes quand il a pleuré, c’est la précipitation quand il est allé vers le Christ, bienheureux Pierre quand il a entendu les paroles – lui qui n’osait plus être Apôtre – : « m’aimes-tu ? » il a répondu : « Tu sais que je t’aime ».
Voilà pourquoi le jour du Bon Pasteur, prenez en considération une chose, que le grand but de tous les pasteurs et prêtres, ce n’est pas tellement diriger, administrer, mais surtout pour vous aider, pour que votre âme ressuscite par la pénitence, amen. Lire l'homélie en entier

Homélie du 20 mars 1955 – 4ème dimanche de Carême
Le mot « métanoïa » se traduit en français par « pénitence » ; ce terme est peu adéquat, car le mot grec exprime parfaitement, au contraire, le changement de l’être, la « transformation », la nouvelle naissance. La vraie pénitence ne consiste nullement, en effet, à s’installer dans le remords ou dans le regret d’avoir commis telle ou telle action.
L’expression et le geste liturgiques qui expriment le mieux la pénitence, sont : « Fléchissons les genoux – Levez-vous » ou : « Prosternez-vous – Levez-vous ». Tel est le rythme. Quand vous êtes tombés, ne restez pas dans la contemplation de votre chute, prosternez-vous devant Dieu, et puis, relevez-vous, rythme de la mort et de la vie.
Je m’élève aujourd’hui contre une fausse doctrine de la pénitence : s’agenouiller intérieurement et ne pas se relever. Oui, il est beau de se sentir pécheur, le dernier de tous, oui, il est beau de verser des larmes de repentir, de se frapper la poitrine comme le publicain de répéter : « Dieu, purifie-moi, pécheur ! » Mais le sentiment d’un publicain ne doit pas exclure le sentiment complémentaire : ne pas douter un instant de la miséricorde divine. Après nous être humblement prosternés, nous ne devons pas manquer de nous relever promptement en confessant l’amour de Dieu pour nous.
Ce double sentiment, humilité et certitude du pardon de Dieu, cette double confession de notre qualité de pécheurs et de la miséricorde divine est une notion simple qui ne se complique que dans les âmes compliquées. […]

Homélie du 21 février 1960 – Sexagésime
[…] Et plus le temps de jeûne et de pénitence est profond, plus notre âme fleurit et devient printanière, car il y a une telle correspondance entre la vraie pénitence et le printemps que notre cœur de pierre s’adoucit Évitant la distraction des herbes mauvaises qui étouffent le bon grain, nous préparons, en nous concentrant, la bonne moisson.
En vérité, c’est une période de concentration de la prière, de jeûne, de la demande de pardon, de révision de notre âme. Plus est ardente notre pénitence et plus elle prodigue à notre âme la floraison, la joie qui augmente en Dieu. […]

Homélie du 9 février 1969 – Sexagésime
[…] La période de pénitence est celle où Dieu nous donne libéralement la possibilité d’être collaborateur de notre salut, de travailler sur nous. […]

Homélie du 3 avril 1955 – Rameaux
[…] Il y a toujours beaucoup d’agitation autour des grands événements de la vie spirituelle, mais rien ne doit vous arrêter ; votre pensée ne doit pas s’arrêter sur le monde, mais sur le Christ, mystère de notre salut. Il nous donne encore ce soir le temps de faire pénitence mais à partir de mercredi, après l’onction, nous ne saurons plus si nous sommes dans la joie ou dans la peine, si nous sommes homme ou femme ; mais pendant ces trois jours où le Christ va mourir et ressusciter, tâchez de mourir à votre moi, de haïr votre âme, et si vous passez ces trois jours vraiment dans l’église, vous serez incorporés au Christ, ni extérieurs, ni intérieurs, ni subjectifs, mais rien que Lui, et dans la Nuit de la Résurrection, à l’exclamation : Alléluia !, vous ressusciterez en Lui ! Amen.

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Homélie du 13 octobre 1968 – 19ème dimanche après la Pentecôte
[…] On a complètement perdu conscience du fait que la pénitence est une renaissance. C’est le printemps de l’âme. Celle-ci meurt quand elle cherche des excuses objectives ; mais elle renaît, fleurit, quand elle reconnaît ses fautes et ses défaillances devant Dieu. Quand on dit : « que voulez-vous, c’est l’habitude, parce que… », l’âme meurt. Si on dit : Seigneur, c’est ma faute, l’âme revit. Le cœur contrit est comme la terre qui reçoit une pluie salutaire et le soleil de miséricorde. Elle s’ouvre, devient vivante...
La pénitence, c’est une renaissance et aussi, comme disaient les prophètes, le cœur de pierre qui devient un cœur de chair. Il y a dans la pénitence, un certain re-baptême ; l’homme est rebaptisé, relavé. […]

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La condition initiale de la renaissance morale
[…] Le transfert de la cause du péché à l’extérieur est l’origine de la perdition et de la mort, l’acceptation de sa propre culpabilité est le commencement de la pénitence et du renouvellement. C’est à propos de cet acte initial de notre relèvement que la voix clamait dans le désert : « Repentez-vous, car le royaume des cieux est proche ». « Repentez-vous », c’est à dire admettez que la cause est uniquement à l’intérieur de vous-même (s’il y avait une cause extérieure le repentir serait absurde), « car le royaume des cieux est proche » c’est à dire, que les causes extérieures seront bientôt détruites par le sang du Seigneur Jésus ; le baptême, la grâce et d’autres sacrements vous seront offerts.
Telle est la condition initiale de la renaissance morale aussi bien individuelle que collective.
Bulletin de la Confrérie Saint-Photius n°1, ANASTASIS, 1934.

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Repentir et Pénitence (nous mettons ce texte en entier : l’ensemble est un trésor spirituel)
Le Carême est la période de pénitence.
La pénitence est le printemps de notre âme, le renouveau de notre vie.
La pénitence est totalement opposée au sentiment de scrupule, au complexe de culpabilité, à l’auto-critique mélangée d’auto-défense qui trouble notre sommeil et paralyse notre esprit.
La pénitence est vivifiante et fertile, la fausse pénitence – complexe ou scrupule – est stérile, destructive, et nous enchaîne.

Où réside la différence ? La pénitence se place en face de Dieu, les complexes en face de notre personne.
Le pénitent prie : « Seigneur, aie pitié de moi ! » ; le complexé gémit : « Comment ai-je pu faire ceci ou cela ! ».
Le pénitent est centré sur Dieu ; le scrupuleux sur son moi.
La pénitence, c’est l’amour de Dieu ; la culpabilité, c’est l’amour propre. Le pénitent s’élance vers Dieu miséricordieux et plein de bonté, il aspire au pardon et non à la justification.
La pénitence s’alimente à l’amour divin blessé.
La culpabilité, même si elle se souvient de Dieu, s’en souvient comme d’un Dieu qui pardonne difficilement ; inquiète elle refuse le pardon gratuit parce qu’incapable, en son inconscient, de se pardonner.

Comment reconnaît-on que l’amour-propre détrône l’amour de Dieu ?
Par le désir ardent de plaire, par une sensibilité aigüe de l’opinion des autres, par la souffrance intérieure devant la critique, par l’exigence d’une justice vis-à-vis de sa personne, par la sensation d’être incompris ou mal jugé, par l’exagération de ses propres fautes, par la mémoire de ses vertus et des services rendus, par la crainte d’exprimer ses vrais sentiments, par le complexe d’infériorité qui peut se transformer en agressivité, par le désir de possession, de jouissance et d’honneur.
L’amour de Dieu naît lorsque l’homme est indifférent à l’amour ou à la haine, à l’admiration ou à la critique portée à sa personne. L’opinion des autres sur lui ne détermine pas sa sensibilité : « J’ai péché contre toi seul ». Il accepte joyeusement les injustices envers lui mais s’indignera des injustices commises envers les autres ! Il est sobre et mesuré quant à ses qualités. L’agressivité et la timidité sont étrangères à son âme. La possession, la jouissance et les honneurs ne le touchent pas outre mesure, ni ne l’obsèdent.
Afin de passer de l’amour-propre à l’amour de Dieu, du complexe de culpabilité à la pénitence, scrutons notre âme et demandons au Sauveur le pardon de tout ce qui nourrit l’idolâtrie de notre moi. Posons-nous par exemple cette question : « Quand je souffre d’incompréhension, d’affronts, de calomnies, suis-je réellement chrétien ? » Car cette « souffrance » est un sacrifice à ma propre idole et non une oblation à Dieu. Cet état d’âme est un péché ! Sans tarder implorons le pardon divin et reconnaissons notre faiblesse devant nos frères.
La pénitence peut être personnelle ou collective. L’amour-propre peut aussi bien s’installer dans un groupe que dans une âme.
- D’une part, un seul membre peut, avec une sensibilité maladive, complexer la collectivité («On me traite mal… », « Il n’y a pas de rapport entre la beauté de la doctrine et les agissements de la communauté !… », « Où est la charité chrétienne ?… ») Il devient irrécupérable si lui-même ne combat pas son propre moi ;
- D’autre part, la collectivité peut se croire lésée par le monde extérieur, rechercher un succès facile, l’appréciation, au lieu de poursuivre l’amour et le pardon de Dieu.

Je vous en prie, mes fils, que chacun offre sa pénitence et que tous ensemble nous fassions de même, vérifiant autant dans nos communautés, nos paroisses et nos églises si nous sommes devant Dieu ou devant le moi « haïssable », personnel ou collectif.
Lettre pastorale de carême, extraite de « Ascèse et Pénitence », mars 1967