L'union des Églises

 

Conférence du 24 juin 1963

[...] Et comme j’avais le temps, je commençai de calculer un peu naïvement sur combien de points nous sommes d’accord nous, chrétiens orthodoxes, romains, luthériens, anglicans, baptistes, réformés, etc. En 6 heures, j’ai compté 1400 points sur lesquels tous les chrétiens sont totalement d’accord ! Mais, dès que nous sortons du cadre du Christianisme, nous trouvons une multitude d’opinions sur les choses essentielles. Quand même, malgré toutes les disputes, les guerres religieuses, l’inquisition, les anathèmes à travers les siècles, avoir 1400 points d’accord !... Je ne peux pas tout énumérer, mais commençons par le commencement : tous sont d’accord que Dieu est seul et unique créateur de l’univers et qu’Il a créé le monde du néant ; tous sont d’accord qu’il n’y a pas préexistence de la matière, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de dualité entre Dieu et le monde ; tous sont d’accord que le monde n’est pas une émanation divine mais qu’il est d’une autre nature que Dieu, qu’Il pose en dehors de Lui par sa volonté, etc. Alors, au cours de la réunion œcuménique qui suivit, je déclarai : « nous sommes saturés de notre unité ».[...]Lire plus

 

Homélie du 24 janvier 1965

[...]Vous voyez, pour arriver à une véritable union, on doit aussi accepter une véritable multitude. L’union dans la confusion ou la soumission, ce n’est pas l’union. Prenons les paroles de l’apôtre Paul. Il y a « un seul Esprit, un seul Seigneur, un seul Père » et tous les trois sont un seul Dieu, un seul Dieu en trois personnes.

La même chose pour nous, les hommes. Comment devons-nous commencer l’œuvre d’union ? Paul commence par l’Esprit et les dons et il a raison. On ne peut pas juger les choses sans, comment dirais-je, voir les dons. Pour aller vers l’union nous devons reconnaître en chaque chose, en chaque époque, en chaque peuple, en chaque individu, en nous et en notre voisin, quel est son don spécifique. [...]

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Extrait d'une homélie sans date

[...] Je vous citerai un exemple historique. Les guerres religieuses ont profondément ébranlé l’Europe. Pendant cent ans l’Église catholique avec l’Église protestante étaient en guerre sanglante dans toute l’Europe, l’humanité était fatiguée de ce christianisme qui verse le sang, de ces chrétiens qui devaient être frères et qui se haïssaient, qui sont devenus des penseurs - et c’est ce qui est le plus triste! - ,  qui ont dit : « assez de ce fanatisme religieux », et qui  ont proclamé la tolérance. Et cette tolérance était indispensable parce que la vie est devenue intenable : le sang, la haine au nom du Christ étaient intenables. Mais - il y avait un "mais" -  en introduisant la tolérance religieuse, ils ont aussi introduit l’indifférence religieuse. Et voilà pourquoi toutes les unités, toutes les paix, les pacifications ne sont pas bonnes si elles entraînent aussi l’indifférence. Et cette tolérance, si le crime était la lutte, les guerres religieuses, la guérison n’était pas bonne non plus ; car elle a introduit dans le monde les êtres qui ne sont ni chauds ni froids mais tièdes religieusement. Et les peuples d’occident sont devenus tièdes pour la religion, et la bouche du Christ, comme dit l’Apocalypse, les a vomis. [...]

 

Homélie du 3 mars 1968

[...]Il y a deux choses inséparables et complémentaires. L’amour et la vérité. [...]

Dans la charité, il y a toujours et encore la charité. Si on prend la charité, c’est un feu, c’est le feu immense, brasier de feu dans lequel il y a une toute petite planche en bois, l’univers. Mais la charité n’est rien, ça devient une chose inefficace s’il n’y a pas aussi la fidélité à la vérité qui est l’épée. Si la charité est pacifique, la vérité, c’est l’épée. « Ce n’est pas la paix que J’ai apporté » dit le Christ, « mais l’épée » qui tranche, qui tranche pour le bien. L’homme qui aime sans vérité n’aime pas. La vérité sans charité est un mensonge. La charité sans vérité n’est pas le feu sacré. La charité sans vérité, c’est l’eau qui n’est pas contenue dans la coupe mystique de la vérité. Voilà pourquoi le jour de la gloire de l’Orthodoxie, après la divine liturgie, nous allons proclamer solennellement nous confessons, nous confessons, nous confessons la divine Trinité et après nous allons écarter de fausses doctrines. [...] lire l'extrait au format audio

 

 

L'Eglise orthodoxe en face de l'oecuménisme

[...] Vis-à-vis du mouvement œcuménique de ces dernières années, l’Église orthodoxe n’a pas adopté une conduite unilatérale. Deux opinions, deux courants semblent la départager.

La première tendance accepte la collaboration avec les autres Églises chrétiennes sur le plan pratique, sans croire que l’unité de la foi puisse être réalisée dans l’état actuel des communautés chrétiennes. Le Patriarche de Constantinople, dont l’exarque pour l’Europe, le métropolite Germanos de Thyatire est un des présidents du comité central œcuménique, accepte ce point de vue.

L’autre tendance met l’accent sur l’unité de la foi. Elle insiste sur la nécessité d’un travail dogmatique en commun – si l’on veut atteindre l’unité de la foi – et la pose comme base, comme condition de collaboration. La conférence de Moscou de 1948 est le porte-parole de ce sentiment et jugement.

Mais ces deux tendances, si différentes quant à la tactique qu’il ne faut pas d’ailleurs prendre dans un sens absolu, ne brisent pas l’unité intérieure de l’Orthodoxie : ces deux manières d’agir renferment une seule opinion. Aucun compromis dans le plan dogmatique, retour à la Tradition du premier millénaire de l’Église indivise et d’autre part le minimum d’exigences formelles suivant en cela le principe canonique : « entre la rigueur et la miséricorde, choisir la miséricorde ». [...] Lire le texte en entier

 

Homélie du 27 janvier 1963

[...] Quelle attitude chacun de nous doit-il avoir vis-à-vis des autres confessions, vis-à-vis de ce qu’elles croient ou ne croient pas, vis-à-vis de l’humanité ?

[...] il y a deux attitudes vis-à-vis du monde : guerre ou paix. La vraie attitude chrétienne : si c’est possible, être en paix avec tout le monde et, si ce n’est pas possible, Dieu a apporté l’épée spirituelle, coupons. Mais quand même, dans cette phrase-là, nous devons chercher non la guerre mais la paix. Paix avec ceux qui ne pensent pas comme nous. Paix avec ceux qui sont incrédules. Si c’est possible, voyez-vous ! Qu’est-ce que chercher la paix ? C’est une certaine manière de comprendre l’autre et ne pas couper prématurément. Tâcher de comprendre notre adversaire, quelqu’un qui nous heurte par son opinion, son attitude, s’efforcer de le comprendre, de voir qu’en lui il n’y a pas seulement une chose négative ; mais peut-être que derrière la haine il y a la souffrance, peut-être que derrière l’athéisme il y a une recherche d’un Dieu plus véridique et qu’il L’a mal compris. [...] Lire l'homélie en entier

 

Homélie du 16 janvier 1966

[...]D’un côté c’était la tradition hiérarchie-sacrement (catholique), de l’autre côté, le prophétisme de l’Évangile (protestant). Vous avez remarqué que ces deux aspects sont largement représentés dans tous les mouvements œcuméniques. Mais il y a un troisième mouvement qui y prend part, c’est l’Orthodoxie. Et ce qui est caractéristique, c’est que l’Orthodoxie y a pris part, mais elle ne constitue pas pleinement une troisième voie. Ceci provient du fait que l’Occident, dans les derniers siècles, s’est partagé entre les deux confessions et que l’Orthodoxie (à cause des événements politiques) était réfugiée plutôt en Orient. Cet aspect qui n’est plus confessionnel mais culturel et géographique a placé l’Église orthodoxe dans une position tout à fait spéciale. D’un côté elle a apporté une troisième voie qui n’était ni catholique romaine, unique avec cet accent sur la hiérarchie, la tradition, l’autorité, le sacrement, ni cette voie évangélique qu’a apporté le Protestantisme fidèle à la Parole. Elle a apporté quelque chose de différent, étant traditionnelle mais aussi pneumatologique, c’est-à-dire vivant par le Saint-Esprit. Son langage était différent.

Mais la difficulté dans le dialogue des rencontres œcuméniques était que la majorité des catholiques-romains et protestants considéraient la voie orthodoxe comme une voie spécifique enrichissante, apportant un élément tout à fait nouveau pour eux, mais en même temps ils ont trouvé et trouvent encore des excuses pour dire que l’apport de l’Orthodoxie c’est très bien, c’est intéressant, c’est enrichissant, mais que cela ne les engage pas beaucoup, puisqu’ils ne sont pas orientaux. Autrement dit, on confondait et on confond encore l’Église orthodoxe universelle et l’Église orthodoxe locale. Et dans ce sens-là, on entend toujours la voie de l’Orthodoxie dans une tonalité inexacte.[...] Lire l'homélie en entier

 

Homélie du 26 janvier 1964

[...] L’Église, dès le commencement des temps, pensait toujours à l’univers. Dans le rite oriental, les litanies commencent pour la paix du monde. Ayant prié pour l’univers entier, on consacre, en quatrième lieu, une intention de prières à l’Église et aux chrétiens. Telle est la structure, si on peut dire de la pensée et du cœur d’un chrétien qui est toujours universel et ne se contente pas de la chapelle, d’une limitation. Car, dès le premier martyr Etienne, nous ne confessons pas un Sauveur de l’homme, ou d’un groupe de gens, d’initiés, mais nous confessons le Sauveur de l’univers entier, le Sauveur du ciel et de la terre.

Dans le rite des Gaules, il y a dans les litanies aussi : « jusqu’aux extrémités de la terre », et cette phrase dans l’Offertoire : « et pour tous, et pour tout ». C’est toute la totalité, tout l’univers, tous les êtres humains qui sont devant nos yeux quand nous prions. Et regardez aussi les litanies qu’on lit le Vendredi Saint dans l’Église romaine et que nous lisons pendant le Carême. Prions-nous seulement pour les chrétiens ? Nous prions aussi pour les Juifs, les athées, les incrédules et les idolâtres. Telle est la nature authentique de cette race nouvelle, de cette race étrange qu’est la race du Christ, le peuple royal, animé par l’Esprit-Saint et dans lequel coule le sang de Notre Seigneur, l’Esprit universel. [...] Lire l'homélie en entier

 

Amant de la Vérité

[...] Sans la passion de la Vérité, la paix entre les peuples et l’union des Églises sont vaines, promises à l’échec. Le malin se glisse invisiblement dans les climats de « tolérance et de bienveillance indifférente » qui entourent souvent les mouvements œcuméniques.

Certes, la passion désintéressée de la Vérité n’a rien à faire avec l’esprit sectaire et fanatique, mais, malgré leur opposition, ils sont généralement confondus.

Les défenseurs de la Vérité sont persécutés et leur destin est celui des martyrs. Les sectaires, au contraire, sont agressifs, persécuteurs, meurtriers. [...] Lire la suite

 

Homélie du 26 janvier 1969

Comment va-t-on réellement aller vers l’union ? L’apôtre Paul, ce génial apôtre Paul, inspiré, ce docteur incomparable, dans son épître aujourd’hui dit une petite phrase que peut-être vous n’avez pas remarquée ou qui a peut-être frappé vos oreilles. Il parle d’un seul baptême, d’un seul Dieu, d’un seul corps, d’une seule espérance, c’est l’unité de base ; et après il ajoute cette petite phrase : « un seul Dieu au-dessus de nous, parmi nous et en nous ». Sa pensée exacte, celle d’un homme inspiré, nous introduit dans la hiérarchie et dans les étapes de l’unité. Il ne dit pas que nous sommes unis et que nous devons travailler l’union de Dieu en nous, religion uniquement intérieure, il ne commence pas non plus par Dieu parmi nous, illusion sociale, ecclésiale ; il commence par Dieu au-dessus de nous, et après, parmi nous et après, en nous. Autrement dit pour que l’unité soit réelle, nous devons avant tout chercher l’unité en Dieu et dans Sa Révélation. C’est seulement quand il y a la recherche réelle de cette unité, c’est-à-dire la confession réelle de Dieu au-dessus de nous, qu’on peut et qu’on doit alors chercher l’unité parmi nous, ecclésialement parlant. C’est après seulement que l’on doit accepter que, dans l’Église, nous devons trouver Dieu en nous. Car si quelqu’un n’aime pas son frère, comment peut-il dire qu’il aime Dieu, et comment peut-il avoir Dieu en lui ? lire l'homélie en entier