EGLISE CATHOLIQUE ORTHODOXE DE FRANCE

Avril - Mai 1967

LETTRE PASTORALE DE PAQUES

 

Christ est ressuscité ! Alléluia !

 

La joie pascale est si puissante pour les chrétiens que l'om­bre de la tristesse s'évanouit. D'une voix débordante d’allégresse, nous chantons à plein gosier : "C'est la Pâque; la Pâque du Seigneur, Pâque très pure qui brille sur nous, Pâque, terme de toute tristesse!"

 

Nous le chantons depuis deux mille ans, et si par volonté di­vine le monde s’arrêtait, nous crierions encore pendant des mil­lions données: "Christ est ressuscité! En vérité Il est ressusci­té!" Rien ne peut étouffer notre enthousiasme, ni notre joie to­tale et lumineuse.

En effet, si le Christ n’est pas ressuscité, l’histoire de l’humanité et l’existence du cosmos entier ne sont qu'absurdité.

 

Mais Il l’est. Telle est notre certitude, et alors "tout est illuminé, le ciel, la terre et l’enfer."

 

La vie de chacun aboutit au tombeau. Lui "resplendit, sortant du tombeau comme d’une chambre nuptiale". Il vivifie le monde par Son amour divin. Sans la Résurrection, toute la création chemine vers le tombeau universel, le vide glacial ou l’ennui mortel de l’éternel retour. Mais le Christ est ressuscité dans Sa chair, supprimant la domination de la mort, l’irréparable; dépassant le temps, libérant la matière de la pesanteur en lui procurant "la liberté glorieuse des enfants de Dieu".

 

S’il est ressuscité, nous ressusciterons aussi et avec nous l’univers, car nous sommes Ses membres. Il est notre Chef réca­pitulant en Lui toute création.

 

Il a participé pleinement à notre souffrance : affamé avec les affamés, haï, maltraité, crucifié afin que la tragédie du monde, nos guerres sanglantes et fratricides, nos maladies, la famine des peuples, la mort enfin, servent de marchepied à la Résurrection et au triomphe de la vie divine.

 

En hébreu, mes bien-aimés, Pâque signifie "passage". Le peuple hébreu a traversé la mer et le désert pour pénétrer dans la Terre promise. Pour nous, les milliards d’années de notre monde et l’histoire de notre race sont le passage, la Pâque vers la Résurrection universelle en Christ ressuscité. Nous avons traver­sé à pied sec la mer du paganisme, nous passons à pieds infatiga­bles le désert de l’athéisme pour parvenir à la glorieuse résurrection à laquelle nous participons déjà mystiquement, anticipant sur le temps, communiant au Christ glorifié avec le Père et l’Es­prit Saint aux siècles des siècles.

 

Riches de ce don unique, embrassons-nous les uns les autres! Disons :"Frères" même à ceux qui nous haïssent, pardonnons tout à cause de la Résurrection et clamons: "Christ est ressuscité des morts, par la mort Il a vaincu la mort! A ceux qui sont dans les tombeaux, Il a donné la vie! Alléluia !"

 

JEAN, Evêque de Saint-Denis