Chapitre 1

 

Extrait du chapitre 1 du cours sur Ezéchiel

 

Le prophète décrit tel qu’il est, afin de bien montrer que ce qui va se passer n’est pas une supra-structure de sa pensée, un état d’âme ou une projection de son imagination, mais la violation de sa personnalité psychique par le choc de la Révélation, une irruption en son être de « faits » étrangers à son existence « normale ». Cette mentalité spirituelle objective diffère de celle de certains hommes qui glissent dans la non objectivité tant ils consi­dèrent leurs propres expériences et réflexions rationnelles comme totale­ment objectives. Leurs hypothèses, leurs conceptions du monde qu’ils cons­truisent ne sont souvent que subjectives. La personne du vrai prophète et du vrai chrétien est humble, elle enregistre, elle s’incline devant quelque chose qui n’est pas elle, qui la transcende et qu’elle ne comprend même pas. L’objectivité en soi, qu’elle réside dans la nature, la vie, la pensée ou la Révélation, est une démarche s’efforçant d’accepter ce qui n’appartient pas au jugement, à l’appréciation et à la sympathie subjectives. Car, inconsciem­ment, on s’écarte de l’expérience qui heurte ou déconcerte, on désire rejoin­dre dans l’expérience ou dans la pensée ce qui correspond à notre mentalité et qui nous flatte.

 

Après deux mille ans d’existence, le christianisme, fondé sur la charité, n'aurait-t-il pas dû supprimer au moins les passages de l’Ancien Testament pénibles à notre conscience ? ... et voici, il n’a rien supprimé. Nous les lisons « in extenso », objectivement, par respect et ignorance du sens caché les paroles. Ne nous pressons pas, à la suite d’un Tolstoï, de rectifier l’Evangile, gardant ce qui nous agrée, rejetant ce qui nous déplaît. Nous ne son­gerons point, par exemple, à célébrer la Divine Liturgie selon la mode du XXe siècle, en accord avec une nouvelle ambiance. Il nous arrivera, peut-être, à Noël ou à Pâques de subir des symboles étrangers à notre humeur du moment ... peu importe, ils prendront plus tard leur place juste.

 

Quand Ezéchiel nous apprend qu’il est fils de prêtre et se trouve au bord du fleuve Kébar, notons que sa vision n’est pas un commentaire, une interpré­tation mais une description. De même, il ne commentera nullement les paroles de Dieu qui brusquent sa sensibilité personnelle.